jeudi 15 décembre 2016

Des souris et des hommes de John Steinbeck

Lennie serra les doigts, se cramponna aux cheveux.
- Lâche-moi, cria-t-elle. Mais lâche-moi donc. Lennie était affolé. Son visage se contractait. Elle se mit à hurler et, de l'autre main, il lui couvrit la bouche et le nez. - Non, j'vous en prie, supplia-t-il. Oh, j'vous en prie, ne faites pas ça. George se fâcherait. Elle se débattait vigoureusement sous ses mains... - Oh, je vous en prie, ne faites pas ça, supplia-t-il. George va dire que j'ai encore fait quelque chose de mal.
Il m'laissera pas soigner les lapins.





George et Lennie vagabondent de ranch en ranch en enchaînant les travaux agricoles. Lennie est atteint de déficience mentale et n'arrive donc pas à s'intégrer. Il enchaîne les bêtises qui les forcent tous deux à fuir à la recherche d'un nouveau travail. George essaye tant bien que mal de prendre soin de lui car il l'a promis à Clara, la tante de Lennie.
Les deux amis ont un rêve: celui d'avoir leur propre ranch pour vivre à leur compte et non plus pour les autres. Cependant, avec Lennie ce n'est pas tâche aisée. Bien au contraire même ! Leur arrivée dans un nouveau ranch va déclencher un drame qui m'a, personnellement, retourné.

L'auteur montre la réalité de l'Amérique profonde des années 30. Les noirs sont mis à l'écart avec, en exemple, le seul "nègre" de la ferme qui a interdiction d'entrer dans le dortoir des employés. Il passe ses soirées seul pendant que les autres jouent aux cartes ou discutent après leur dure journée de labeur.
De plus, bien que les personnages rêvent tous de vivre autrement, personne ne cherche réellement à sortir de sa condition. L'argent que les hommes gagnent, ils le dépensent dans les bars et les bordels. Ils sont solitaires et deviennent mauvais au fil du temps.

Lennie est un homme grand qui ne maîtrise pas sa force. Il est retardé mais abat du travail comme personne. Il rêve de s'occuper de lapins qu'il pourrait caresser tout au long de la journée et George le lui promet sans cesse. Sa tante lui offrait des souris quand il était petit mais il les tuait toutes car il ne maîtrisait pas sa force. Cet homme m'a beaucoup touché par son innocence et son incapacité à contenir ses envies qui se caractérisent par des pulsions.
George est un homme plutôt petit et nerveux. Il passe son temps à pester contre son ami car sa vie serait bien plus facile sans lui. Cependant, il le protège et y est profondément attaché. Il craint la solitude et aime le fait que chacun puisse prendre soin l'un de l'autre.
Leur relation est extrêmement touchante, surtout lorsqu'ils énumèrent leur avenir dans leur ranch au milieu des vaches, poules et lapins. On sent que Lennie a envie d'être rassuré et que George souhaite ardemment réaliser ce rêve. Pour eux, tout est possible car ils sont ensemble et ont la force de venir à bout de leur rêve.

Un autre personnage m'a touché: Candy. C'est un vieil homme qui a perdu une main pendant les travaux au ranch. Depuis, il s'occupe des basses besognes car il ne peut plus aider dans les champs. Il est toujours accompagné de son vieux chien aveugle qui se déplace difficilement. Les autres personnages ne le supportent pas car il pue et arrivent à le convaincre de le tuer pour mettre fin à ses souffrances (et surtout aux leurs). Le vieux accepte mais sa peine est palpable.

Ce livre est écrit presque comme une pièce de théâtre. Il y a beaucoup de dialogues et peu de descriptions. Cependant, l'histoire n'est pas superficielle pour autant. Cela donne un côté plus dur et plus réel au monde dans lequel évoluent George et Lennie et on ressent la solitude de ces hommes qui vivent presque comme des esclaves.
De cette dureté en ressort une vive émotion. On ne peut se sentir étranger à ce qu'il se passe au fil des pages et des discussions. C'est pourquoi, lorsque j'ai refermé le livre, j'avais l'impression d'étouffer. J'étais bouleversée mais heureuse de ressentir le lien qui unissait ces deux amis.